7 Mars 2015
"La vigne antique en Languedoc"
Conférence par Stéphane Mauné
Stéphane Mauné
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Le samedi 7
mars, M. Stéphane Mauné, archéologue et directeur de recherches au
CNRS a prononcé une conférence sur le sujet cité en titre. Après
sa présentation par le président André Nos, M. Mauné a tout
d'abord rappelé qu'il avait commencé à travailler à Montagnac
avec M. Feugères et que leurs travaux avaient été soutenus par la
municipalité de Montagnac, le conseil général de l'Hérault et la
région Languedoc Roussillon. Depuis 25 ans beaucoup de découvertes
ont été mises au jour malgré la disparition des fouilles de
sauvetage car la vallée de l'Hérault concentre une série
remarquable de sites qui ont profité à l'archéologie du terroir.
Casalis de
Fondouce et Heinrich Dressel ont été les premiers à ouvrir la voie
avec la découverte d'une "étiquette"
d'amphore disant en latin : « je suis un vin de Béziers
vieux de cinq ans ».
Au VIème
siècle avant J-C les gens s'habituent au vin, le triangle
Marduel - Agde - Marseille voit la domestication de la vigne sauvage
et la plantation de cépages grecs. Après la chute de Carthage les
marchands italiens mettent sur le marché des vins italiens. Cette
époque connaît les phénomènes d'imitation des amphores et de
concurrence. Au IIème siècle avant J-C, le puissant sénat romain
interdit la plantation de la vigne en Gaule transalpine, c'est à
dire en Provence, Languedoc et Roussillon. Un siècle plus tard après
la conquête de Jules César, Rome a la maîtrise totale des voies de
communication gauloise et on assiste à la mise en place d'un
vignoble de rapport avec l'installation de familles italiennes en
Gaule. A partir de 30 avant J-C et jusqu'au IIème siècle après J-C
c'est la montée en puissance commerciale du vin. Après cette
époque, la grande production vinicole algérienne inondera les
marchés, conséquence de la colonisation romaine. La culture de la
vigne connaît la taille en gobelet et en Italie, le palissage qui
coûte 30%de plus.
Le moût
s'obtient par foulage aux pieds et pressurage. Les pressoirs en bois
permettent d'obtenir 40% de jus en plus. Les remarquables
diapositives et les dessins de M. Mauné donnent une idée de ce
qu'était cette technique romaine.
En général
les exploitations plantent 5 à 6 000 pieds à l'hectare, les plus
productives jusqu'à 12 000 pieds. Mais les parcelles ne comptent que
quelques hectares car la polyculture domine avec forêts, chemins
nombreux, emblavures et vergers. Des plans de villas, nom romain des
des domaines, au Gasquinoy, à la Domergue de Sauvian et à
Montferrier de Tourbes constituent de bons exemples d’exploitations
viticoles.
Pour
transporter le vin, les Gallo-romains et les Romains utilisent de
grands dolia et des amphores. La carte des fouilles nous indique que
presque tous les ateliers de poterie se trouvent sur la rive droite
de l'Hérault. Les chais sont de tailles différentes, les plus
grands se trouvant dans les villes. Avec 9000 hectos, Vareille est la
plus grande, connue à nos jours. Dans l'antiquité, le rendement est
estimé à 40 hectos à l'hectare. Vareille s'étendait sur environ
200 hectares et on comptait une personne pour 2 hectares en
entretient total.
La viticulture procure au maître un enrichissement constaté avec les restes de fontaines et de statues trouvées sur le terrain des villas. Le plan de Vareille dévoile deux cours d'eau, trois moulins hydrauliques et deux aqueducs. A Saint Bézard près d'Aspiran on a trouvé dans un chai entre 17 et 20 après J-C une pièce de monnaie frappée à Nîmes. Deux timbres sur dolia nous signalent que Quintus Priscus travaille avec son affranchi Vitullus qui doit être un bon vinificateur et que Laïtus œuvre à Aspiran après avoir été en activité à Barcina (Barcelone).
Le plan de Saint Bézard montre que les dolia se trouvent dans les remblais, ce qui offre au vin une température à peu près constante. D'autre part les propriétaires enfumaient les chais pour tuer les drosophiles soupçonnées de faire piquer le vin, ce que Louis Pasteur prouvera dix huit siècles plus tard par ses études sur les bactéries.
Le raisin était amené sur la partie la plus haute de la cave, et en deux rampes, tombait de la cuve de foulage dans deux cuves de décantation et de fermentation. Les plus grands dolia contenaient de 14 à 20 hectos de liquide. Ces ancêtres en terre, des conteneurs modernes étaient fabriqués à la main au colombin.
En 2005 on a fouillé les ateliers de Pompeï et leurs deux fours pouvaient produire de 20 à 40 dolia à chaque cuisson. Leurs descendants actuels sont les tinajas de Villarobledo en Espagne. Dans des puits on trouve de l'eau et des débris organiques qui ont permis d'identifier certains cépages transportés dans les dolia. Les pépins analysés révèlent qu'ils proviennent de clairette, variété résistante et adaptée à la région. En moindre quantité on a de la mondeuse et du merlot. La taille des pressoirs n'est pas proportionnelle à celle des exploitations. Les grands bassins correspondent à peu de cépages et les petits bassins à des variétés plus nombreuses.
Commencées
à la mi-août, les vendanges s'achevaient fin octobre. Notre région
devait abriter environ 200 ateliers de fabrication d'amphores mais
les plus importantes se trouvaient en Arles et à Beaucaire. La gamme
des amphores comportait les allongées, les cylindriques et les
fuselées mais à partir de 60 après J-C on ne fabriquera que deux
modèles. Ces récipients ont voyagé jusqu'en Inde et dans la haute
vallée du Nil.
Le vin que
l'on appelait, nectar des Dieux et génie des hommes était du blanc
ou du rosé. L'antiquité n'a pas connu le rouge car les viticulteurs
antiques pressaient les rafles avant la fermentation. Pour la
conservation, dolia et amphores étaient poissées avec de la poix
issue de pins sylvestres. Enfin les anciens ont commercialisé des
vins au miel ou aux herbes. La manutention et le transvasement
s'opéraient à l'aide de pompes en corps de bronze ou de vis
d'Archimède, à partir du VIème siècle après J-C on assiste à la
disparition et à l'abandon de nombreuses villas que leurs riches
propriétaires vendent ou quittent pour placer leur argent là où il
rapporte le plus.
Sur cette
note finale stigmatisant le capitalisme immuable, M. Mauné a terminé
sa remarquable conférence tout en expliquant à ses auditeurs
attentifs que les problèmes posés aux Gallo-romains pouvaient être
les mêmes que ceux qui assaillent les viticulteurs méridionaux au
XXIème siècle.
15 mars 2014
"Les sculpteurs en Languedoc au XVIIème siècle"
Conférence Denis Nepipvoda
M. Denis Nepipvoda |
Dernièrement
Denis Népipvoda, historien d'art bien connu des Montagnacois, a
prononcé, devant une assistance nombreuse une conférence
remarquable sur le sujet cité en titre. Les sculpteurs qui ont
œuvré et créé en Languedoc au XVIIe sont au nombre de 8 et
possèdent de nombreux points communs. Sauf un, ils sont tous nés
dans notre belle province. Ils ont presque tous pris femme dans des
familles appartenant à leur confrérie, si bien qu'on peut parler
d'endogamie dans les métiers d'art. Ils ont surtout travaillé à la
restauration ou à l'aménagement d'œuvres religieuses endommagées
au cours des guerres de religion. Enfin, inspirés par l'idéal d'art
classique de Paris, ils ont su cependant innover en utilisant toutes
sortes de matériaux : marbre de Caunes, calcaire blanc de
Pernes, résineux de Quillan, noyers du Dauphiné et même mélange
de bois et pierre. Ces grands créateurs locaux tels les Jourdan, G.
Martrois, les Suberville, Coula, Mercier, Thomas, Cannet et Laucel
ont embelli les épiscopales de Montpellier, Béziers, Agde, St Pons
de Thomières et aussi de nombreuses petites paroissiales du futur
département de l'Hérault : en particulier St Thibéry,
Creissan, Pomérols ou la chapelle des Ursulines de Pézenas, que le
conférencier a engagé l'auditoire à visiter.
De
nombreuses questions relatives au transports des matériaux, à la
carrière des artistes, ( de l'apprentissage à la maîtrise ) au
style local et à l'organisation des confréries ont complété ce
brillant exposé qui a enrichi la culture voire l'érudition de tous
les participants.
Le Président André Nos |
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19 janvier 2014
« 1914 : Histoire et mémoire aux Amis de Montagnac »
Conférence de Mme Yvette Médina
L' histoire
c'est d'abord une boucherie de quatre ans qui a coûté 1.400.000 morts à
la France, soit un dixième de sa population active en ce début de XXème
siècle. Les Français ont voulu commémorer, c'est à dire se remémorer
ensemble l'immense soulagement de l'armistice du 11novembre1918. De
l'inhumation du soldat inconnu le 11-11-1920 à l'hommage rendu par le
Président Hollande à tous les morts pour la France le 11-11-2012 , Mme
Médina a évoqué tous les 11 novembre célèbres du XXe siècle. Elle a
ensuite présenté tous les lieux de mémoire installés ou érigés sur
l'hexagone : le wagon de Rethondes, le mémorial de Vimy, les ossuaires
de Douaumont, Lorette,la forêt des écrivains combattants située dans
l'Hérault et enfin les innombrables monuments aux morts, porteurs
souvent de symboliques très différentes : deuil, sacrifice, épuisement,
solidarité et même malédiction de la guerre comme à Angerville. Mme
Médina a cité enfin les témoignages écrits célèbres comme les romans de
Barbusse et de Dorgelès ou plus humbles comme les carnets de guerre de
Louis Barthas tonnelier socialiste audois, racontant sa guerre au jour
le jour, au ras des tranchées et qui a révolutionné l'histoire de la
première guerre mondiale. En conclusion Mme Médina a cité l'historienne
Anne Jollet mettant en garde contre les commémorations béates car " les
guerres sont toujours et d'abord le fait de choix politiques ",et a
évoqué le vers d'Aragon, poète mais aussi médecin des tranchées : " Déjà
la pierre pense où votre nom s'inscrit..." Des questions sur le mythe
de la fleur au fusil et sur les fusillés pour l'exemple ont clos cette admirable communication empreinte à la fois d'une grande clarté et d'une profonde humanité.
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